Et après, il y aura… ton petit frère

M. savait qu’un bébé allait arriver, il s’y préparait en prenant soin de son petit poupon à la crèche, il caressait mon ventre, prêtait son doudou au bébé en l’étalant délicatement sur mon gros ventre, à sa demande je lui lisais tous les soirs le livre « Et après, il y aura… » il savait que je ne pouvais plus beaucoup le porter ni le prendre sur mes genoux, il l’appelait bébé chouchou, et un beau jour de septembre, Little G est arrivé…

M. est venu à la maternité avec ma maman le mercredi après-midi, j’avais accouché la veille, son père était en train de changer Little G, j’ai filmé la scène car je m’attendais à le voir surpris ou émerveillé mais il l’a regardé avec un air assez indifférent et a escaladé mon lit pour me faire un câlin. Le lendemain il est revenu avec mes beaux-parents mais il n’a jamais voulu repartir, sa maman lui manquait, et il ne comprenait pas pourquoi je devais rester à l’hôpital. On est rentrés à la maison le samedi tous les 3 puis M. nous a rejoins, il était très brusque avec son  petit frère, ce bébé qu’il ne connaissait pas et qui lui piquait déjà sa maman.

Les premières semaines ont été très difficiles, avec un allaitement exclusif et une tétée toutes les 2h cela me laissait peu de temps pour m’occuper de M. Dès que Little G était au sein il en profitait pour faire des bêtises et se faire remarquer, il y a eu beaucoup de pleurs, de cris, de frustrations à gérer, de câlins interrompus et il y a eu l’incident de trop…
Alors que je changeais la couche de Little G à l’étage, j’entends M. qui faisait beaucoup de bruit en bas mais je ne savais pas ce qu’il faisait. Le berceau de Little G. était dans le salon, un petit berceau en bois blanc que j’avais acheté pour qu’il puisse être avec nous et qu’on puisse en profiter davantage. M. avait tapé dessus de toutes ses forces avec un petit marteau en bois bleu, un jouet innofensif d’apparence, et a complétement éclaté le lit, plein d’impacts qui résument la violence du geste.
J’étais incapable de me calmer, je voulais qu’il disparaisse de ma vue, je voulais qu’on le prenne et qu’on l’emmène loin de moi, j’étais en larmes, je ne reconnaissais plus mon bébé, cette violence, cette indifférence, et cette arrogance quand je lui dis « mais c’est pas possible M. ne me dit pas que tu n’as pas vu que tu l’abîmais» et qu’il me répond du haut de ses 2 ans et demi « si c’est possible »… c’est là que je me suis décidée à prendre rdv avec la psychologue de la crèche comme me l’avait conseillé une éducatrice.

Ce rdv m’a fait un bien fou, rencontrer quelqu’un d’extérieur qui m’a expliqué qu’en plus d’être dans dans un âge difficile (le fameux Terrible Two dont je vous parlais ici), l’arrivée du petit frère lui faisait perdre sa place de bébé et son exclusivité, on lui demandait du jour au lendemain d’être un grand frère et d’assumer un nouveau rôle dont il ne voulait pas. Je m’étais préparée à des moments difficiles mais je ne pensais pas que ce serait si compliqué à gérer avec la fatigue et les nerfs qui lâchent un peu trop.

Heureusement il y a eu aussi de belles surprises. La première fois que je suis allée le chercher à la crèche avec Little G, un de ses copains faisait du vélo dans le couloir et il lui a dit « attention Tom c’est mon petit frère », j’en ai eu les larmes aux yeux, c’était la première fois que je l’entendais dire « mon petit frère » et avoir ce geste protecteur qui paraissait si naturel.
J’ai commencé à l’impliquer davantage dans notre quotidien, en le laissant jouer à sa manière avec son frère, en lui demandant de m’accompagner pour le changer, en lui expliquant qu’il est tout petit et ne sait pas faire grand chose alors que lui peut courir, sauter, parler, il n’a pas toujours été très délicat mais il était déjà plein de tendresse à son égard et petit à petit la complicité s’est installée.

Depuis 5 mois maintenant, M. se considère toujours comme un petit bébé et non plus comme un petit garçon comme au mois d’août mais ça lui passera. Je le laisse prendre son frère dans ses bras, il le réclame dès qu’il se lève le matin et se précipite pour aller le voir et lui faire un bisou. Il le fait rire et Little G le lui rend bien en lui faisant ses plus jolis sourires. J’aime les voir jouer tous les deux, je sais que ce n’est que le début de leur complicité, des bêtises, des bagarres, des souvenirs et d’un amour fraternel.

Et après, il y aura… deux grands amis.